Président arbitre. Voilà ce que doit être le président de la République française. Le rôle de capitaine doit être celui du Premier ministre. Un président français qui joue au capitaine viole l’esprit de notre Constitution. Qu’en est-il dans les faits ? Du général de Gaulle à Emmanuel Macron, tous ont violé cet esprit, en particulier depuis Nicolas Sarkozy. 😠
Vous trouvez cette position forte, surprenante, voir osée ? Soyez rassuré·e : à ESPOIR RIC, nous abhorrons les affirmations infondées. Dans cet article, nous répondons de manière claire, brève et argumentée aux questions principales attenantes à cette problématique. Mieux ! Nous proposons des solutions pour y remédier. À vos synapses & bonne lecture ! 🧠
Sommaire
- Président arbitre, président capitaine, c’est quoi ?
- Le Président français est-il un président arbitre ou capitaine ?
- Dans quels pays y a-t-il des présidents véritablement arbitres ?
- Le Président français doit-il être un président arbitre ou capitaine ?
- Un président français arbitre et capitaine : une violation de l’esprit de notre Constitution
- Comment faire pour avoir un vrai président arbitre en France ?
Président arbitre, président capitaine, c’est quoi ? 🤔
Un « président arbitre » est un président doté de pouvoirs constitutionnels :
- qui lui donnent un rôle proche de celui d’un arbitre de jeu sportif, par exemple d’un arbitre de foot ;
- qui limitent très fortement ses possibilités d’influencer la politique de son pays.
Pour un président, ce n’est bien sûr pas d’un jeu sportif dont il est question. Le jeu dont il est l’arbitre est le jeu politique, avec ses règles fondamentales dictées par une constitution.
Le « président capitaine » se conçoit à l’opposé du président arbitre. Ses pouvoirs constitutionnels lui permettent de diriger la politique de son pays, sans forcément lui assigner un rôle d’arbitrage significatif.
Le Président français est-il un président arbitre ou capitaine ? 🤨
Se demander si le Président français est un président arbitre ou capitaine requiert de se poser la question selon deux points de vue :
- celui de la Constitution française elle-même ;
- du point de vue des faits, de la pratique.
Examinons à présent chacun d’eux.
Dans la Constitution française 📜
Dans la Constitution française, il est clair que les pouvoirs attribués au président font de lui un président arbitre. Prenons par exemple l’article 5 :
Le Président de la République veille au respect de la Constitution. Il assure, par son arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l’État.
« veille au respect de la Constitution » et « assure, par son arbitrage » sont des marqueurs limpides du rôle d’arbitre du Président français.
À l’aube de la rédaction de la Constitution française moderne, ce rôle d’arbitre était d’ailleurs clairement souhaité par le général de Gaulle (discours de Bayeux, 16 juin 1946) :
A lui [le Président de la République] l’attribution de servir d’arbitre au-dessus des contingences politiques, soit normalement par le conseil, soit, dans les moments de grave confusion, en invitant le pays à faire connaître par des élections sa décision souveraine.
Dans les faits 🎥
Dans les faits, les présidents français se sont permis d’aller bien au-delà de leur rôle constitutionnel d’arbitre. Ils se sont permis de s’approprier les prérogatives normalement dévolues au Gouvernement, à savoir déterminer et conduire la politique de la nation (article 20). Ce phénomène s’est largement accentué depuis la présidence de Nicolas Sarkozy, conduisant certains à parler d’« hyper présidence » [1,2]. En pratique, les présidents français se sont donc érigés en présidents capitaines (tout en conservant leurs pouvoirs d’arbitre).
En résumé :
Dans la Constitution française, le Président est arbitre. Dans les faits, c’est un président capitaine avec des pouvoirs d’arbitrage.
Dans quels pays y a-t-il des présidents véritablement arbitres ? 🇪🇺
Par souci de cohérence avec le cas Français, nous nous en tenons uniquement :
- aux Pays de l’Union européenne ;
- dans lesquels le Président est élu directement.
Parmi ces pays, ceux dans lesquels on trouve un président véritablement arbitre sont (dans la constitution et dans les faits) :
- l’Autriche 🇦🇹 ;
- l’Irlande 🇮🇪 ;
- l’Islande 🇮🇸 ;
- la Finlande 🇫🇮 ;
- le Portugal 🇵🇹.
À noter que, d’après l’Economist Intelligence Unit, la France se situe derrière ces pays en matière de démocratie (à l’exception du Portugal).
Le Président français doit-il être un président arbitre ou capitaine ? 👨🏻⚖️
Dans les faits, le Président de la République française est un président capitaine avec des pouvoirs d’arbitrage. Cette situation est-elle moralement justifiée ? Serait-elle moralement plus justifiée si notre Président se cantonnait à son rôle d’arbitre ?
Dans cette section, nous défendons que :
- Il est moralement injustifié que le Président de la République française joue au capitaine-arbitre.
- Il serait moralement bien plus justifié qu’il se cantonne à son rôle d’arbitrage.
Pourquoi ? Pour bien comprendre nos positions, il faut d’abord bien distinguer les éléments essentiels du débat.
Constitution : le texte, son interprétation, son esprit 📜
Énonçons à nouveau notre position :
Il est moralement injustifié que le Président français joue au capitaine-arbitre. Il ferait mieux de s’en tenir à son rôle d’arbitrage.
Pour saisir pleinement l’argumentaire qui nous amène à cette conclusion, il faut distinguer :
- la Constitution française en tant que texte ;
- comment les acteurs définis dans la Constitution française (Président, Gouvernement, Premier ministre, Parlement, etc.) interprètent le texte dans la pratique ;
- l’esprit de la Constitution française.
Qu’est-ce que l’« esprit de la Constitution française » ? 👻
Par « esprit de la Constitution française », nous désignons le principe général de justice qui a régulé son écriture. Ce principe est de tendre vers les meilleurs équilibre et séparation des pouvoirs politiques possibles. Le respect de ce principe est crucial pour minimiser des risques comme les abus de pouvoir ou les conflits d’intérêt. Ce principe est nettement visible dans un des discours célèbre du Général de Gaulle qui ont préfiguré notre Constitution actuelle (discours de Bayeux, 16 juin 1946) :
[…] tous les principes et toutes les expériences exigent que les pouvoirs publics : législatif, exécutif, judiciaire, soient nettement séparés et fortement équilibrés et, qu’au-dessus des contingences politiques, soit établi un arbitrage national qui fasse valoir la continuité au milieu des combinaisons.
Idéalement, le texte de la Constitution et la manière dont ce texte est interprété doivent se conformer à l’esprit de la Constitution. Si l’on peut montrer que le texte et son interprétation contredisent cet esprit, alors il y a insuffisance morale (sauf à remettre en cause l’esprit de la Constitution).
Ceci étant dit, voyons maintenant en quoi nos présidents ont violé et continuent à violer l’esprit de notre Constitution.
Un président français arbitre et capitaine : une violation de l’esprit de notre Constitution 😡
Dans la Constitution française, le rôle de capitaine est dévolu au Gouvernement, et en particulier à son chef, le Premier ministre :
Le Gouvernement détermine et conduit la politique de la nation. (article 20)
Le Premier ministre dirige l’action du Gouvernement. (article 21)
Que signifie en pratique qu’un président français joue au capitaine ? Cela signifie qu’il s’approprie les pouvoirs du Premier ministre pour les cumuler avec les siens propres d’arbitrage. Comment constate-t-on, dans les faits, cette appropriation ? On peut la constater de plusieurs façons :
- Le Président représente la France à l’étranger à la place du Premier ministre 🌍.
- La quasi-totalité des annonces concernant la politique de la nation (terrorisme, Covid, Ukraine, etc.) sont faites par le Président, et non le Premier ministre 📺.
- Dans la Constitution, le Premier ministre n’est jamais responsable devant le chef de l’État. Pourtant, sur le site « vie-publique.fr », rattaché aux services du Premier ministre, on peut lire : « […] le Premier ministre est responsable devant le chef de l’État, ce qui n’est pas le cas en période de cohabitation ». On peut en déduire que dans les faits, il l’est 🧎🏻.
- Les présidents français utilisent de moins en moins leurs pouvoirs propres (qui sont des contre-pouvoirs : dissolution de l’Assemblée nationale, référendum, veto sur les décrets, veto suspensif sur les lois). S’ils n’utilisent plus leurs armes de contre-pouvoir, c’est qu’ils sont au pouvoir 👑.
- Tous les candidats aux élections présidentielles s’engagent sur des programmes politiques législatifs. S’ils n’étaient pas assurés d’être aux manettes une fois élu 🎮, ils ne prendraient pas de tels engagements.
- Le Conseil constitutionnel (!) reconnaît sans aucune ambiguïté la situation : « [….] la plupart du temps, c’est bien davantage le chef de l’État que le Gouvernement qui détermine la politique de la Nation. »
- Les citoyens français ressentent fortement à quel point leur Président concentre les pouvoirs. En témoigne leur importante participation aux élections présidentielles, comparativement aux autres élections 🗳️ [3].
Ainsi, le Président français joue indiscutablement au Premier ministre (au capitaine) tout en conservant ses pouvoirs d’arbitre. Cet état de faits contredit ouvertement l’esprit de notre Constitution. En ce sens, son comportement est moralement condamnable 🦹🏼♀️.
Comment faire pour avoir un vrai président arbitre en France ? ⚙️
En l’état, une simple déclaration d’intention de la part d’un candidat à une élection présidentielle ne peut être crédible. Pourquoi ? Car si la majorité parlementaire est alignée sur la majorité présidentielle, alors le Président se trouve dans une situation idéale pour gouverner. C’est la situation que nous vivons depuis la dernière cohabitation (1997-2002 ; il y a 20 ans !).
Pour sortir de ce traquenard, plusieurs options sont possibles, avec assurément certaines encore à imaginer. Parmi les options disponibles, mentionnons :
- inverser à nouveau le calendrier électoral entre présidentielles et législatives ;
- instaurer le RIC constituant (et le référendum obligatoire).
Inverser à nouveau le calendrier électoral 🗓️
Depuis 2001, les élections présidentielles précèdent les élections législatives. Cette situation constitue un obstacle majeur à l’émergence d’un authentique président arbitre pour les raisons suivantes :
- Le parti d’un président fraîchement élu est assuré d’un net avantage électoral aux législatives qui suivent [4]. Les candidats du parti du président sont en effet préférentiellement choisi en fonction de leur allégeance au Président 😍.
- En conséquence, si le Président désigne quelqu’un dans une circonscription, celui-ci a plus de chances de gagner 🥇.
- Une fois majoritaire, les députés nouvellement élus accepteront le Premier ministre que le Président leur dit d’accepter 🙏.
- Le Premier ministre devient le larbin du Président 🐕🦺 ; l’Assemblée nationale devient la chambre d’enregistrement de ses décisions 🙏.
- Le Président gouverne, ce qui est en totale contradiction avec l’esprit de notre Constitution ☹️.
De plus, avec une Assemblée nationale acquise à sa cause, le Président ne souffre d’aucun risque d’être destitué durant son mandat. Par ailleurs, rappelons également que, dans le cas d’Emmanuel Macron en 2017 :
- celui-ci n’a bénéficié que de 18 % du soutien du corps électoral lors de son élection (en assimilant le « soutien » aux résultats du premier tour) ;
- son parti n’a bénéficié que de 15 % du soutien corps électoral aux législatives.
Nous sommes donc confrontés à une situation où :
- un individu qui ne bénéficie que d’un faible soutien démocratique 🏜️;
- cumule une importante quantité de pouvoir 👑 ;
- sans aucun garde-fou conséquent pour le rappeler à l’ordre durant son mandat 🍾.
C’est une véritable situation d’urgence démocratique.
Bonne nouvelle : il y a sûrement un moyen facile de faire bien plus démocratique et conforme à l’esprit de notre Constitution ! C’est exactement ce que propose Espoir RIC, via l’instauration du RIC constituant (et du référendum obligatoire).
Instaurer le RIC constituant (et le référendum obligatoire) ✊
Aujourd’hui, une fois élu, le Président a presque quartier libre pour imposer sa vision politique à tout le monde. Il a quartier libre pour jouer au capitaine :
- en parfaite contradiction avec l’esprit de notre Constitution,
- et avec très peu de risques d’être destitué.
Le RIC constituant est un outil formidable pour placer notre président sous contrôle citoyen direct. La simple existence de cet outil dans notre Constitution change radicalement la mentalité d’un président 🧠, car il sait :
- que la population peut décider par elle-même de limiter ses pouvoirs ⛓️;
- qu’elle peut exiger une plus grande transparence de ses comportements 🪟 ;
- qu’elle a le pouvoir de contrer ses mesures ⚖️ ;
- qu’en principe, elle est en capacité de le destituer directement 🚮 (en mettant en place les mesures constitutionnelles adaptées).
Par ailleurs, le RIC constituant pourrait être un bon moyen d’inverser à nouveau le calendrier électoral ! Il est même raisonnable de penser que cette inversion soit plus probable avec RIC constituant qu’avec décision parlementaire. L’Assemblée nationale étant largement du côté du président, elle n’y a en effet aucun intérêt 😴.
Le RIC constituant doit toutefois impérativement être accompagné du dispositif appelé « référendum obligatoire ». Ce dispositif fait que toute modification constitutionnelle doit être approuvée par référendum. Ainsi, aucun risque que les représentants débricolent en douce le RIC constituant 🛠️ (ou les mesures constitutionnelles prises par son biais).
Soulignons enfin que pour que tout ceci marche, il sera essentiel de viser une meilleure transparence de la vie politique. Fini les conseils des ministres ou de défense sanitaire opaques 🌫️. Hors peut-être cas particuliers de défense armée nationale, il est crucial que la vie politique du Président soit visible de tous 🎥. Cette transparence est indispensable pour que nous puissions contrôler la conformité de son action à notre Constitution, et plus important encore, à l’esprit de notre Constitution.
📕 Références 📕
- [1] Denis BARANGER (2013), Le droit constitutionnel, PUF, Que sais-je ? coll. 6e éd.
- [2] Gilles CHAMPAGNE (2015), L’essentiel du droit constitutionnel, 1. Théorie générale du droit constitutionnel, Gualino, Carrée rouge coll. 14e éd.
- [3] Raùl Magni Berton. Reassessing Duvergerian semi-presidentialism: An electoral perspective. Comparative European Politics, Palgrave Macmillan, 2012, pp.29.
- [4] Raùl Magni Berton, Max-Valentin Robert. Maximizing presidential coattails: the impact of the electoral calendar on the composition of the National Assembly. French Politics, Palgrave Macmillan, 2017, 15 (4), pp.488-504.
📕 Pour approfondir 📕
La question d’instaurer le RIC constituant en France soulève souvent la crainte d’un retour possible de la peine de mort. À ce sujet, nous recommandons la lecture de l’article : Démocratie & peine de mort : quels sont les risques ?